Contemporary Dynamics of the Bou Kounta Qadiri Community
By Maria Grosz-Ngaté
20150621_CheikhBecayeCoulibaly
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Entretien : El Hadji Cheikh Bécaye Coulibaly, Ndiassane, le 21 Juin 2015
00 :02 : Hady Sow (HS) : Bonjour, père!
Cheikh Bécaye Fall: Je rends grâce à Dieu. Bonjour!
00 :09 : HS : Est-ce que vous pouvez vous présenter ? Qui êtes-vous ? Comment est-ce que vous vous appelez et qui sont vos parents… ?
Je me nomme Cheikh Bécaye Coulibaly, je suis née à Ndiassane, j'ai fait mon enfance ici également. Mon père est décédé quand j'avais quatre ou cinq ans. Ce qu'il m'a confié est qu'il était musulman, marabout, et il en était fier et digne. Comme Dieu l'a arraché à notre affection, ce qu'il me conseillait était de ne pas mentir, de ne pas voler. « Tout ce que tu veux même si tu ne peux pas l'obtenir à moins que tu ne le voles, dis le moi et je te le volerai. Je peux être voleur, mais toi, ne sois jamais un voleur ». Il m'a amené à l'école coranique quand j'avais sept ans, mais je n'étais pas doué pour l'apprentissage du Coran à l'époque, c'est à l'âge de 15 ans que j'ai commencé à vraiment maitriser le Coran. J'ai fait sept ans d'apprentissage où je n'ai pu rien maitriser de ce que j'apprenais. Mon maître coranique s'appelait Mouhamadou Sylla. Mais Dieu a fait qu'il n'avait qu'un seul fils qui était maladif, ce qui fait que j'étais comme son fils dans l'école coranique. Je supervisais les enfants et je m'occupais bien de lui. Mon maître coranique lui-même m'a dit un jour, « Bécaye, je voudrais vraiment que tu apprennes le Coran, mais tu n'es pas doué pour cela ». Il m'a fait toute sorte de potions pour que je sois doué pour l'apprentissage du Coran, mais cela était toujours sans succès. Quand mes camarades célébraient leur maîtrise de la moitié du Coran, moi j'étais à la sixième partie de l'initiation à la lecture du saint Coran, tandis qu'ils en étaient à leur trentième. Ils se moquaient même de moi, en me disant que j'étais nul. Mais pendant les sept autres années qui restaient, Dieu a fait que je fus tellement doué au point de terminer et de maîtriser le Coran bien avant eux. Quand je maîtrisais le Coran à l'époque, le fils du petit frère de mon père [mon cousin] était venu le chercher.
C'était mon grand-père qui avait envoyé mon père auprès de Cheikh Bou, parce que mon père devait s'engager dans l'armée. On lui avait remis l'argent de l'impôt qu'il devait payer à Ségou, notre village s'appelle Dougabougou, c'est là-bas qu'on cultive le sucre maintenant, l'usine de sucre se trouve là-bas. Quand il est parti payer l'impôt, ils l'ont remarqué et ils ont décidé de venir le chercher afin qu'il s'engage dans l'armée. On l'a caché et on leur a donné un de nos esclaves, mais les blancs ont réclamé celui qui avait payé l'impôt, c'est-à-dire mon père, au lieu de l'esclave qu'on leur avait donné. Et ils ont dit « si vous ne nous donnez pas celui que nous avons vu payer l'impôt, vous allez souffrir ». C'est à ce moment-là que mon père est sorti, parce qu'il entendait tout ce qui se disait, et il dit qu'il ne voulait pas être responsable de la souffrance de ses parents. C'est ainsi qu'il est parti.
A la suite, quand ils ont fait les visites médicales, ils se sont aperçus qu'il n'était pas apte et ils lui ont demandé d'attendre l'année suivante. Son oncle était un roi dans sa contrée. Lorsqu'il entendit ce qui c'était passé, il vint le voir. A son arrivée, il lui dit qu'il pensait qu'il s'était engagé dans l'armée. Mon père lui expliqua que puisqu'il n'était pas apte, on lui avait demandé d'attendre l'année suivante. C'est alors que son oncle partit voir Mbirane qui était un bambara doté d'un pouvoir mystique et ce dernier lui dit que son neveu [mon père] ne serait pas dans l'armée mais que son étoile se trouvait en Afrique de l'ouest, qu'il ne serait pas non plus à Dougabougou, mais en Afrique de l'ouest. C'est ainsi que mon grand-père le prépara et lui remit 100 « ngourdous » et un mouton tout blanc et lui demanda de marcher vers l'ouest, puisque le gentil homme qu'il doit rencontrer s'y trouvait. Une fois arrivé chez lui, prosterne-toi devant lui et convertis-toi à l'Islam, au lieu de rester ici et de t'engager dans l'armée. C'est ainsi que mon père se mit en route.
La marche dura trois mois. A l'époque pour aller à Ndiassane, il fallait passer par Khombole, parce que c'est plus proche de Ndiassane. Lorsqu'il arrive à Khombole, on lui montre le chemin qui mène vers Ndiassane. Une fois à Ndiassane, il est allé au lac, parce qu'à l'époque avant d'entrer dans la cité, il fallait se laver et faire ses ablutions et avant qu'il ne termine sa toilette, Cheikh Bou avait quitté Ndiassane pour venir à sa rencontre au lac. Il lui dit qu'il savait d'où il venait et que son père l'avait envoyé vers lui et qu'il ne le regretterait pas. C'est comme cela qu'il l'a amené chez lui et s'est occupé de lui et a fait de lui un saint. Il lui a donné son nom, Bou Fall, le nom de famille Fall veut dire Coulibaly en bambara. Comme chez lui il s'appelait Coulibaly, quand il est venu ici, on lui a donné l'équivalent de Coulibaly qui est Fall. C'est ainsi qu'il a fait de lui un saint, c'est lui qui faisait les potions, il l'a enseigné, c'est lui qui soignait les fous. Ils étaient tout le temps ensemble. S'il y a des invités qui venaient du Mali, c'est mon père qui s'occupait d'eux. C'est ce qui fait que maintenant c'est moi qui m'occupe des invités qui viennent du Mali.
C'est au bout de 10 ans que Cheikh Bou lui a dit que sa mission était arrivée à terme et mon père lui a demandé s'il devait rentrer chez lui et il lui répondit que non, qu'il devait rester avec la famille. Cheikh Bou lui confia que son heure était proche et que cela se passerait la nuit et que si cela arrivait qu'il l'enterre la nuit même. Cheikh Bou lui dit « Si vous attendez jusqu'au petit matin, les gens de Ndankh viendront chercher ma dépouille parce que je viens de là-bas. Et dans ce cas Ndiassane perdrait toute sa bénédiction qu'il avait acquise avec moi. Par contre si vous me gardez ici quiconque prendra le khalifat, ma place, sera bénit et cela continuera ainsi jusqu'à la fin des temps ». Il nous a aussi demandé de travailler dure. C'est ainsi qu'on a suivi ses recommandations, et quand les gens de Ndankh sont venus, ils ont dit qu'ils allaient l'amener. Il a fallu l'intervention du commandant qui leur a dit que puisque son fils aîné était plus apte à en décider et qu'il avait choisi de l'enterrer à Ndiassane donc qu'on le laisse à Ndiassane.
A l'époque, Cheikh Sidy Lamine, de retour de la Mauritanie où il était parti étudier, s'était lancé dans le commerce. Quant à Cheikh Bécaye, quand son marabout a voulu qu'il revienne, le Cheikh l'a renvoyé en Mauritanie pour qu'il y étudie encore chez un autre marabout. Et il faisait ainsi la navette à la quête du savoir. Puisque Sidy Lamine avait beaucoup d'argent, il était suivi par tout le monde. En plus, puisqu'il il était riche et qu'il était suivi par tous, il s'est senti puissant et a décidé de prendre le khalifat de son père. Mon père lui dit qu'on ne pouvait pas s'opposer à sa décision, mais que cela ne se faisait pas là d'où il venait. « Chez nous à Ségou, le petit frère ne saurait diriger son grand frère, Cheikh Bécaye est ton grand frère même s'il n'a rien, c'est lui qui doit prendre le khalifat », luit dit-il. C'est ainsi que Sidy Lamine a laissé le khalifat à Cheikh Bécaye. Ce dernier aussi à fait de mon père son proche conseil et celui qui s'occupait de ses invités.
Quand ma mère aussi a été sevrée, mon grand-père la aussi confiée à Cheikh Bou. Cheikh Bou s'est occupé de tous les deux, dans la maison. Il y a aussi la mère de ma cousine Béty Kounta qui été confiée à Cheikh Bécaye. Et quand ils étaient en âge de se marier, Cheikh Bécaye a appelé ma mère pour lui dire qu'il voulait l'envoyer chez Bou Fall, à l'époque il y avait un lépreux dans le village et personne ne voulait s'approcher de lui. Ma mère lui répondit que même si vous m'envoyiez chez ce lépreux j'irais chez lui. Et Cheikh Bécaye fut satisfait de sa réaction et lui répondit qu'elle saura qu'il a un père digne de ce nom et que s'il plaisait à Dieu qu'elle n'aura que du succès dans cette demeure. Quand elle y vivait, elle a eu huit enfants, des garçons et des filles, je suis son huitième fils. Son fils aîné s'appelle Mbarka. Mais comme nul ne peut échapper au destin, presque tous ses enfants moururent avant elle : il ne restait que moi et mes deux grandes sœurs. Les six autres moururent avant elle. On était les seuls trois à avoir vécu après elle.
12 :14 : HS : Et vous le plus âgé?
Non, je n'étais le plus âgé qu'un seul de mes frères. Les deux filles, Astou et Khady, sont mes grandes sœurs. Je viens après Khady. Mon père s'est éteint quand on était là-bas. Et c'est quand j'étais enfant que ma mère m'a conseillé de bien apprendre. C'est à l'âge de 15 ans, que j'ai maîtrisé le saint Coran.
Quand mon grand-père fut décédé, le jeune frère de mon père vint de Ségou chercher ce dernier parce qu'il devait être le roi de leur village, donc il fallait qu'il rentre. Mon oncle est resté pendant six mois dans la cité avec mon père et tenait à l'amener. Un jour Cheikh Bécaye le convoqua lui et lui demanda s'il était venu chercher son grand frère, il lui répondit que oui. Cheikh Bécaye lui dit qu'ils ne pouvaient plus laisser mon père repartir au vu de la relation que ce dernier entretenait [avec Cheikh Bou] avant eux mais que l'objectif de sa venue, ce pourquoi mon grand-père l'avait envoyé ici, est atteint. Il n'est pas venu ici pour s'accrocher à la vie terrestre mais plutôt pour s'intéresser à la vie de l'au-delà. Ce qu'il était venu chercher ici, Dieu a fait qu'il l'a obtenu. Son petit frère était tellement content qu'il finit par se convertir à l'Islam. Cheikh Bécaye lui donna le nom d'Abderrahmane et ce dernier retourna chez eux. Mon oncle venait souvent rendre visite mais mon père n'est plus reparti depuis son arrivée. Quand il est décédé, même pas neuf jours, le petit frère est décédé aussi. Et quand le petit frère est décédé, son fils, mon cousin ainé est venu me chercher. Quand il est venu … Il se trouve que mon père s'était bien occupé de Cheikh Bécaye. Cheikh Bécaye lui avait dit, un jour, que s'il était devenu lépreux, parce que tout le monde fuyait les lépreux, il était convaincu que Bou Fall ne le fuirait jamais, parce qu'il avait tellement confiance en lui. C'est comme ça qu'il mourût devant lui.
Après sa mort [celle de Cheikh Bécaye], Sidy Lamine devait le succéder mais il n'était pas là. On était resté à l'attendre. Sidy Lamine était à Saint Louis et c'est lui-même qui a construit l'école Téranga de Saint Louis. Mais pour lui, il n'y avait pas à se précipiter, lorsqu'il est venu, on lui a dit qu'il avait pris trop de temps pour venir, et que depuis le décès de son frère on l'attendait, et il nous a demandé pourquoi on l'attendait. Il ajouta qu'il n'était pas venu pour remplacer son frère mais plutôt son père. Ses paroles avaient fait mal à ses frères, parce que son grand frère avait laissé des enfants derrière lui. Et qu'il devait les hériter, s'il refusait de les hériter, son jeune frère allait le faire et hériterait de sa famille et de tout. Mais le khalifat ne se discute pas, seul le plus âgé est promu. C'est ainsi que mon père a suivi Sidy Lamine. [Avant cela], Sidy Lamine a beaucoup loué mon père, Cheikh Bécaye a aussi été loué par Cheikh Bou, Cheikh Bou aussi a été vraiment loué par Cheikh Bécaye, Cheikh Sidy Lamine aussi l'a beaucoup loué.
J'étais encore jeune quand il est décédé, mais il y a un jour, après avoir ensemencé mon champ, il me restait beaucoup de semences. A l'époque nos champs se trouvaient à Keur Yoro, parce que Ndiassane était un tout petit village. C'est Keur Yoro qui a ouvert ses portes à Ndiassane et à Cheikh Bou, ils sont les propriétaires des terres. Quand je suis allé à Keur Yoro pour qu'il me trouve un champ, le vieux Saer m'a demandé qui était mon père et je lui ai dit que c'est Bou Fall et il m'a dit qu'il allait me dire quelque chose que personne à part lui ne connaissait. Cheikh Sidy Lamine était son ami et tous les après-midis, il allait le rendre visite jusqu'au coucher du soleil, et parfois je dinais moi-même là-bas avant de rentrer chez moi. Un après-midi lorsqu'il est parti discuter avec Cheikh Sidy Lamine, Bou Fall est venu avec des invités venant du Mali. Ils ont discuté avec Cheikh Sidy Lamine, après leur discussion, je suis parti accompagner les invités. Le vieux Saer était présent – ses enfants même sont toujours vivants, ils sont venus l'autre jour pour me présenter leurs condoléances – ils se sont salués, il lui a dit que je vais te confier une chose. Cette foule que vous voyez ici présente, est remplie de toute sorte de personnes : des esclaves, des nobles, des gens de castes. Cheikh Bou Fall, lui, est un vrai noble parce qu'il a assisté Cheikh Bécaye de la même manière qu'il l'a fait avec mon père et c'est de la même manière qu'il m'a assisté aussi, il n'a jamais failli. Et c'est ainsi que je lui ai répondu que cette parole valait mieux que le champ que j'étais venu chercher, il me répondit que je ferais mieux d'aller cultiver le champ. C'est le vieux Saer qui m'a expliqué cela.
Quand mon père est mort, et que son frère est venu et qu'il est lui aussi mort neuf jours après lui, le fils du jeune frère de mon père [mon cousin], il est plus âgé que moi, est venu me voir pour m'amener avec lui. Quand il est venu Cheikh Sidy Lamine lui dit « personne ne peut séparer des parents, c'est Dieu qui en a décidé ainsi. C'est ton frère, on n'en disconvient pas, mais on ne peut pas être musulman et retourner pour devenir un athée. Que Dieu nous en préserve. Je vous conseille de le laisser ici afin qu'il étudie, après vous allez continuer à maintenir vos liens de parenté en vous rendant visite très souvent ». C'est sur ces mots que mon frère est parti malgré lui, car ce n'est pas ce qu'il préférait. Arrivé au village, il était très embarrassé du fait qu'il avait promis de venir me chercher et qu'il soit retourné bredouille.
Moi aussi, quand j'ai terminé l'apprentissage du Coran à l'âge de 15 ans, je dis à Cheikh Sidy Lamine que comme mon grand frère était venu me chercher et que vous lui aviez demandé d'attendre que je termine mes études coraniques par la grâce de Dieu, et que maintenant c'est chose faite, je voudrais que vous me bénissiez afin que j'aille les rendre visite. Il a formulé des prières, l'après-midi pour que j'y vais mais la nuit son grand frère qui était à Ndankh mourut. Il était un maître coranique du nom de Baye Bouna Mame. Pendant dix ans, Cheikh Sidy Lamine a occupé le khalifat que ce dernier a quitté. Il a donc été khalife de Ndankh et celui de Ndiassane, il a dirigé les deux cités, pendant dix ans. Et comme je devais partir le lendemain, juste après la prière du matin, Cheikh Sidy Lamine envoya un de ses disciples pour me dire de ne plus y aller, car son grand frère était décédé à Ndankh et c'est lui qui était le Khalife de Ndankh maintenant. Il me conseilla d'aller à Thiès pour y annoncer le décès. Il me demanda d'aller à Keur Issa, à Kounda, à Keur Karamokho, à Keur Simbala et à Tawa et il m'ordonna ensuite de venir passer la nuit à Ndiassane et le lendemain, de voyager avec les disciples qui devaient quitter Ndiassane pour se rendre à Ndankh. C'est comme ça que j'ai annulé ce voyage. Nous sommes partis là-bas et nous y sommes restés jusqu'à la fin des funérailles. Nous sommes retournés, et comme le temps ne me le permettait plus, je suis resté.
A l'époque, c'était à trois mois du gamou, et comme l'hivernage s'approchait, je savais que je ne pouvais plus voyager et qu'il ne me laisserait pas partir. J'ai cultivé mon champ de mil, et fait tout le travail champêtre. Quand ce fut le gamou, lorsque les maliens faisaient leurs bagages pour rentrer, je suis allé à la gare ferroviaire de Dakar sans rien dire à personne parce que si je prenais le train à Thiès j'allais être aperçu par les accompagnateurs. Quand le train est arrivé à Thiès, je voulais que mon jeune frère sache où j'avais gardé l'argent pour la famille durant mon absence. Mon jeune frère est venu à la gare de Thiès pour me remettre cet argent et je lui ai dit qu'il devait utiliser cet argent pour subvenir aux besoins de la famille. Et je lui ai expliqué qu'il fallait que je parte pour rendre visite à mes parents puisqu'ils étaient venus me chercher en vain.
A l'époque je pensais même rester là-bas étudier jusqu'à mon retour. Quand je suis arrivé, il y avait personne pour diriger les prières, lors des fêtes de Tabaski et de Korité ils étaient obligés d'aller à un autre village où il y avait des musulmans pour y effectuer leurs prières. Ils voulaient se convertir à l'Islam, mais il n' y avait personne pour les convertir. J'ai fait six mois là-bas, et je les ai tous convertis à l'Islam, les hommes, les femmes et les enfants. Les enfants, je leur enseignais le Coran. Du matin au soir, je ne faisais qu'écrire des versets du saint Coran sur leurs ardoises. Je n'avais pas de livre avec moi mais c'était comme si le tout Puissant m'avait tout inculqué jusqu'à ce qu'ils aient tous des versets qui leur permettaient de prier. Ainsi je leur ai conseillé de construire une mosquée, parce que si vous venez chez moi pour prier c'est comme si j'étais votre Dieu. Je leur ai demandé de chercher un endroit où construire une mosquée, et ils m'ont dit que nous étions tous égaux dans ce village, que je pouvais choisir n'importe quel endroit pour abriter cette mosquée. Il y avait un grand fromager à l'entrée du village, et j'avais choisi cet endroit-là, et comme on n'avait pas assez d'argent pour construire une mosquée, l'ombre du fromager nous permettait d'accomplir les prières de l'après-midi et du soir. C'est comme cela qu'on a fait et maintenant ils ont construit une mosquée. Après six mois de séjours, je les informe que je n'étais pas venu pour rester, mais que j'étais venu pour leur rendre visite. Ils me répondent qu'ils préféraient que je reste, je leur dit « si je reste cela serait une trahison de ma part, parce que j'avais dit à mon marabout que je rendais seulement visite. Maintenant, si vous voulez que je reste, il faut qu'on aille ensemble le lui demander ». Ils me répondirent que si on y allait, il ne serait pas d'accord. Je leur réponds donc dans ce cas limitons nous seulement aux visites. Cela fait 61 ans maintenant que je fais des vas-et-viens. Aujourd'hui, j'ai fait de la mosquée une grande mosquée. D'ailleurs, c'est eux qui m'ont donnés une épouse.
La première fois que j'y suis allé, à mon retour mon marabout qui m'avait enseigné le Coran m'avait trouvé une épouse. Mais on n'avait pas encore consommé le mariage, je m'étais dit qu'à mon retour je le consommerais. Mais quand je suis parti et qu'ils ont su que j'avais construit une mosquée et que j'y enseignais, ils se sont dit que je n'allais plus revenir. Donc au bout de six mois, ils ont libéré la femme, et ils m'ont écrit une lettre pour me dire que mon beau père avait rompu les liens du mariage, parce que, pour lui, je n'allais plus revenir et qu'il ne laisserait jamais sa fille venir au Mali. C'est ainsi que j'ai demandé à mes grands frères de me trouver une épouse. Puisque nous faisons partie d'une très grande lignée et d'après la coutume Bambara, si vous êtes issu de la même famille, vous ne devez pas vous marier. Vous pouvez marier une femme d'une autre famille mais pas une femme issue de la même famille que vous. Et l'Islam n'interdit pas cela : des cousins et des cousines peuvent se marier. Mes grands frères sont venus vers moi et ils m'ont dit que puisque maintenant ils sont musulmans, et qu'ils suivent mes conseils, ils voudraient que je demande à nos grands-parents qu'ils nous à nous marier entre nous puisque nous sommes dans une grande contrée. Il y a beaucoup de femmes ici et avant que l'on puisse se marier, il faut qu'on aille dans un autre village et cela crée des difficultés. Et j'ai dit d'accord, quand je m'en suis ouvert à mes grands-parents, ils n'étaient pas contre, mais puisque c'était une tradition, il leur était difficile de ne pas se conformer à ces us et coutumes. Mais puisque c'est moi qui suis le premier à émettre cette idée, si je peux être le premier à le faire, ils seraient prêts à me suivre. Au cas contraire, ils ne seront pas les premiers à le faire. J'ai dit d'accord, je serai le premier à le faire (Rires). C'est ainsi qu'on m'a donné comme la veuve d'un cousin (littéralement, le défunt fils du frère de mon père). Et je suis venu avec elle. Dieu soit loué !
Sidy Lamine à qui j'avais demandais la permission, et mon père est aussi mort dans ses bras… Quand mon père est décédé, l'enfant qu'on lui avait confié est par la suite devenu le chef de famille. Parce qu'à l'époque, j'étais encore jeune, je ne pouvais rien faire, donc c'est lui qui dirigeait.
29 :33 : HS: Donc c'est lui qui s'occupait de vous ?
Oui, effectivement, il s'appelait Sély Sy, son fils est maintenant là et il s'appelle Sidy Sy. Par la grâce de Dieu, c'est lui qui était le chef de famille et faisait tout ce que mon père faisait de son vivant. On a cheminé ensemble jusqu'à la mort de Cheikh Sylla, et il a continué. Cheikh Bou a dirigé la cité pendant 30 ans. Ensuite Cheikh Bécaye est venu et est resté pendant 15 ans. Cheikh Sidy Lamine, lui, est resté pendant 44 ans. Mon père est décédé devant lui, le chef de famille aussi est décédé devant lui. Et il ne restait que nous les enfants, Sidy est le plus âgé, c'est lui qui gère la maison et qui fait tout ce que le vieux faisait de son vivant. Si vous voyez que je n'avais pas construit à l'époque, c'est parce que le riz, la patate et tout ce qui est légume se cultivaient ici dans les lacs. Je ne manquais de rien. J'avais déjà acheté le matériel pour construire, j'avais fait des briques en ciment. A l'époque, les gens ne construisaient qu'en argile et en paille dans la cité. Des constructions en ciment n'existaient que chez les Kountas. Quand j'achetais du ciment personne dans la cité parmi les disciples ne pouvait se le payer. Ainsi Cheikh Sidy Lamine m'a dit qu'il allait lotir la cité et que si je construisais, les lotisseurs pouvaient le démolir et cela serait du gaspillage. Donc il m'a conseillé de garder mon matériel jusqu'à ce que l'on lotisse. De ce fait, j'ai gardé mes matériels pendant 20 ans. En fin de compte, là où je cultivais les lacs avaient asséchés, il n'y avait plus d'eau ce qui a fait que j'ai même vendu le matériel.
Quand Baye Modou est venu, même quand Sidy Lamine est décédé, trois jours avant la Tabaski, Cheikh Sidy Yakhya a fait appel à moi pour que je réponde à Ahmadou Kounta. Son fils était même présent dans la maison. Je lui dis est-ce que Baye Sidy Yakhya me connait ? Et il me dit s'il ne te connaissait pas, il ne ferait pas appel à toi. Quand je suis allé le répondre, il me dit « Bécaye Fall, vous qui êtes des bambaras dans la cité, je voudrais que vous veniez tous pour qu'on discute parce que Cheikh Sidy Lamine a tellement duré sur le Khalifat qu'il faut que je discute avec vous. Si tout le monde ne se trompe pas certains se tromperont ». Je lui dis d'accord, mais ce jour-là on avait un baptême, je me suis rendu au baptême pour baptiser l'enfant. Après le baptême quand les gens étaient sur le point de s'en aller, je leur ai dit que Cheikh Sidy Yakhya demande à voir tous les bambaras qui sont dans la cité. Le griot qui était là-bas, à l'époque, et qui était le chambellan du marabout, était un peu surpris parce qu'il pensait que si on doit annoncer un tel message, c'était à lui de le faire mais non à moi. Et il me dit « Bécaye Fall, cesse de mentir Cheikh Sidy Yakhya ne vous a pas dit cela. Quand Cheikh Sidy appelle, il appelle tout le monde sans distinction de race ou d'ethnie parce qu'il n'y a pas seulement des bambaras dans la cité. Il y a les bambaras, les wolofs, tout le monde est représenté ici et il n'est pas de ses habitudes de séparer les ethnies. Ça ce sont les actes de quelqu'un qui cherche à nous diviser ». Là je me suis tu, je ne l'ai pas contredit, j'ai continué à transmettre le message dans la cité, que Cheikh Sidy Makhtar avait demandé qu'on le réponde après la prière du soir. Aussitôt après la prière, le griot est allé s'assoir auprès de Cheikh Sidy Makhtar pensant qu'il est le porte-parole. Je suis venu, je l'ai salué et j'ai pris place. Quand Sidy Makhtar s'est aperçu que les wolofs et les autres ethnies venaient, il a dit, devant l'assistance, « Bécaye Fall, ce n'est pas ce que je vous avais demandé ». Je lui ai répondu que je n'avais appelé que les bambaras. Mais c'est celui-là qui m'a traiter de menteur en me disant que quand vous appeler, vous appelez tout le monde, mais pas seulement les bambaras. Et Cheikh Sidy Makhtar dit à l'assistance qu'il n'avait besoin que des bambaras et qu'il n'avait pas encore besoin du reste. Et là je me suis dit que ce vieux-là je ne le connaissais pas, mais voilà un homme de vérité. Parce que s'il n'avait pas dit cela, les gens allaient penser que j'avais pour intention de diviser. Mais Dieu m'a sauvé d'un tel jugement.
35 :09 : HS : Heureusement, qu'il l'ait dit.
Ainsi, il a demandé aux wolofs et tous ceux qui n'étaient pas bambaras de retourner. Ils nous a amené en haut, il m'a appelé de par mon nom et m'a demandé de dire à mes parents bambaras qu'il voulait nous parler de la bénédiction qu'il y avait dans la cité et qui a incité nos parents et grands-parents à marcher du Mali jusqu'ici pour en profiter, et de qui on tient cette bénédiction. « Dieu a donné cette baraka à Cheikh Bou Kounta, c'est pour cette raison là que vos parents ont quitté le Mali pour marcher jusqu'ici. Mais quand l'heure de Cheikh Bou a sonné, il est parti. Mais la bénédiction est toujours là, et y restera jusqu'à la fin des temps. Il y avait Cheikh Bécaye, ensuite Cheikh Sidy Lamine et vous l'avez suivi pendant 44 ans » dit-il. Après ce fut le tour de Hadji Mouhamed Kounta, il est le père de Baye El Hadji Mamoune qui est le Khalife aujourd'hui. Ce dernier fait deux ans et quatre mois. Il nous a demandé de faire tout ce qu'il nous dit et de se garder de ses interdits. Il nous a aussi demandé de lui présenter nos invités à chaque fois qu'on en a, parce que ce sont ses invités avant tout. Il nous dit que toute la bénédiction que nos parents cherchaient ici est la nôtre maintenant et qu'il fallait que nous suivions ses conseils.
Maintenant, les gens avaient mal vu le fait que je sois celui qui transmettait le message tout simplement parce que mes parents ne le faisaient pas. Mais puisque nos parents n'étaient plus là et qu'on m'avait donné l'ordre de le faire, je ne pouvais que suivre leurs ordres. Donc je préférais rester chez moi prendre les charités des disciples de mon père que de refuser d'obéir au marabout. Même s'il avait allumé un feu et qu'il me demandait d'y entrer, je l'aurai fait tout en étant sûr que je n'aurai pas été brulé. Les gens avaient continué à en parler et Baye Sidy Makhtar eut écho de cela. Il m'appela par suite et me dit « les gens sont entrain de dire du n'importe quoi sur ton dos. Les gens parlent de ce que tu fais et ce que tu n'as pas fait pour Sidy Lamine, alors que tu es responsable et chef de famille dans cette cité ». Je lui dis que oui, mais moi, je sais qui je suis et je sais d'où est-ce que je viens. Je sais tout le sacrifice que mon père a consenti pour venir jusqu'ici pour y chercher de la bénédiction. Je suis là pour suivre les pas de mon père qui ne faisait que suivre les recommandations du Khalife. Et Baye Sidy Makhtar me dit « j'ai entendu tout ce qui se dit de toi. Tu as laissé femmes et enfants pour venir ici pour suivre les enseignements du marabout, mais je te conseille de les ignorer et ceux qui te critiquent t'envieront toujours si tu suis mes conseils ». C'est comme ça que je vis ici et à chaque fois qu'il y a des bambaras qui arrivent on me les envoie et s'ils arrivent chez moi aussi, je les amène chez le marabout. C'est comme ça que je vis ici et c'est ainsi aussi que mes enfants vivent ici, et même si je meurs mes enfants et mes petits fils suivront mes pas.
39 : 51 : HS : Maintenant, vous avez presque répondu à beaucoup de questions. Je voudrais quelques réponses à certaines questions que vous n'avez pas encore répondues. Vous en avez même un peu parlé : c'est quand on vous avait donné une femme et que vous étiez parti et on a rompu ce mariage parce que vous aviez duré là-bas. Par la suite vous aviez même amené une épouse du Mali. Vous avez expliqué aussi que vous cultiviez dans les lacs pour subvenir à vos besoins et cela vous avez même permis de faire des briques pour la construction. Maintenant je voudrais que vous nous expliquiez comment la vie d'aujourd'hui est-t-elle différente de celle dans le passé ?
Il y a toujours une différence, parce qu'à l'époque on travaillait pendant la saison sèche, mais on faisait aussi les travaux hivernaux. On cultivait le mil et l'arachide et, en dehors de la saison des pluies, on cultivait le riz et des légumes, toutes sortes de légumes, de la patate et de l'igname. Quand le lac s'est asséché, on ne pouvait plus cultiver tout cela. Dieu a fait qu'à l'époque j'étais avec le marabout, et les gens se demandaient comment est-ce que je pouvais être en mesure de subvenir aux besoins de ma famille tout en restant tout le temps aux services du marabout, et ils me le déconseillaient. Et je leur répondais que c'est Dieu qui gérait ma famille. A l'époque, ceux qui travaillaient pour leur propre compte ne gagnaient pas ce que je gagnais en travaillant pour le marabout.
41 :38 : HS : Maintenant, je voudrais que vous nous parliez de vos daaras ?
Oui, j'ai un daara au Mali et un autre ici, à Ndiassane.
41 :48 : HS : Comment est-ce que vous avez fait pour mettre sur pied les daaras ?
Je pense que je vous l'ai déjà expliqué, mon maître coranique n'avait qu'un seul fils qui était maladif, et qui ne pouvais rien faire. C'est grâce à mon maître coranique, Mamadou Sylla à qui Cheikh Bécaye avait donné le daara pour qu'il enseigne les enfants et qui venait aussi de la Guinée Conakry. Il était venu à la quête du savoir, et puisque le Cheikh Bécaye avait confiance en lui, il lui avait confié le daara. Moi, je faisais partie de ses élèves. Quand il n'était plus en mesure de faire convenablement son travail à cause de la vieillesse, il me l'a confié puisque c'est moi qui m'occupais de lui. Il y avait aussi un autre cousin qui était là-bas, on le nommait Bécaye Sangharé. Quand je suis parti au Mali, avant mon retour, le maître coranique est tombé malade. Il a fait appel à ce cousin pour lui confier le daara pour qu'il enseigne les enfants jusqu'à ce que je retourne. Et il lui dit « ce daara n'appartient qu'à Bécaye, car c'est lui qui gérait le daara quand j'étais actif et même quand je commençais aussi à être gagné par la vieillesse. Comme il n'est pas là, je sais que tôt ou tard il reviendra, donnez-lui le daara à son retour. Et quand je suis rentré, il m'a confié le daara avant qu'il ne meurt. Je lui ai dit que comme Bécaye Sangharé est mon ainé est qu'il était déjà là, qu'on ferait mieux de le lui laisser et que, ensemble, nous enseignons aux enfants. Il tombe d'accord. Mais nul ne peux se soustraire de la volonté de Dieu. Dieu a fait que Bécaye Sangharé qui n'avait pas enseigné plus de trois mois est décédé. Et le maître me redit « ce daara t'appartient et il faut que tu enseignes aux enfants ». Moi, j'étais dans la grande maison alors que les autres se trouvaient dans le daara qui se trouvait à Mbambara. Nous étions éloignés les uns des autres. Parmi ceux qui se trouvaient là-bas, il y avait quelqu'un du nom de Mamadou Bamba. C'est son petit-fils qui gère le daara maintenant. Il y avait aussi son fils qu'on appelait Bou Bamba. Ils m'ont dit que puisqu'il en est ainsi, vous êtes éloignés les uns des autres, et que le daara se trouve ici, on voudrait que vous vous mettiez ensemble pour enseigner les enfants. Je leur ai dit « D'accord, mais une seule chose ne saurait avoir deux propriétaires. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui soit propriétaire ». C'est ainsi que j'ai choisi de rester chez mon père et d'y enseigner. Et en revenant du Mali, on m'avait donné deux élèves pour que leur enseigne le saint Coran, j'ai débuté avec mes deux élèves, jusqu'à ce que d'autres viennent. C'est ainsi que le daara a été mis sur pied. N'empêche quand je suis parti au Mali parmi ceux que j'ai convertis à l'Islam, il y en avait un à qui j'avais donné mon nom, c'est lui qui est l'Imam de la mosquée là-bas et c'est lui qui gère maintenant le daara que j'avais érigé là-bas.
45 :39 : HS : Maintenant, je voudrais que l'on parle des ziyaras et des dahiras. Comment est-ce que les ziyaras et les gamous se faisaient, quand vous étiez enfants, y a-t-il une différence avec la manière dont on fait cela aujourd'hui ?
Vous savez pour le gamou, Cheikh Sidy Lamine et Serigne Babacar Sy l'ont créé. Mais jadis, il y avait que la fête de la Korité et de la Tabaski. Mais c'est Cheikh Sidy Lamine qui a mis sur pied les gamous chez nous, ici à Ndiassane. A l'époque Serigne Sidy Lamine et Serigne Babacar Sy en avait discuté. Ils ont convenu qu'en ce qui concernait la célébration de la naissance du Prophète (PSL), Serigne Babacar Sy s'en chargerait et Serigne Sidy Lamine se chargerait du baptême. Je me rappelle, à l'époque lors des gamous, quand Tivaouane terminait son gamou, une semaine après, Ndiassane faisait son gamou aussi et c'est ce qui se fait jusqu'à présent. C'est comme cela qu'ils l'ont mis sur pied. Il semblerait même que c'est Cheikh Bou qui leur avait conseillé cela. Il leur avait dit que Tivaouane et Ndiassane sont très proches. Il y a Touba, il y a les Niassènes, il y a les Layènes, mais le jour de Ndiassane est un choix particulier d'Allah. Son jour est venu du Mali pour le trouver au Sénégal, c'est pourquoi nos aïeuls le voyait dans leur rêve et se mettaient en route pour venir célébrer le gamou au Sénégal. A l'époque de Dakar à Bargny, en passant par Rufisque, Sébikhotane jusqu'à Pout, les gens ne prenaient qu'une seule voiture. C'était une grande voiture qui prenait tous les passagers en destination de Ndiassane dans les localités susmentionnées. Les habitants de Thiès venaient à partir de leur région. Ils passaient la nuit pour le gamou, le premier gamou était celui de Serigne Abdou, le deuxième gamou était celui de Sidy Lamine. A l'époque le gamou se célébrait durant deux nuits, et c'est Cheikh Sidy Yakhya qui a supprimé cela. Quand Cheikh Sidy Yakhya est venu il a dit que les gens étaient si nombreux que les maintenir ici pendant deux jours était très difficile. C'est ainsi qu'il l'a réduit en un seul jour. Mais j'ai eu à assister à un gamou où ceux qui venaient du Mali n'était que cinq : Mamadou Dembélé, Moussa Touré et Massamba Ka et Fatoumata Wélé : trois hommes et deux femmes quittaient le Mali. Il y a même eu un gamou où celui qui dirigeait les disciples est décédé ici avant qu'on ne les libère, sa tombe est là dans les cimetières. Aujourd'hui, c'est leur dirigeant qui est là dans la maison. Chaque année la foule ne cesse d'augmenter maintenant.
49 :58 : HS : Comment est-ce-que les ziyaras se faisaient, est-ce-que les daaras venaient ensemble et est-ce qu'ils avisaient le marabout avant de venir ou pas ?
Le ziyara à Ndiassane qu'on appelle la nuit de Cheikh Bou, a été instaurée par Cheikh Sidy Yakhya. Il l'a instauré parce qu'il y a un village ici qu'on appelle Badiga, ce sont ces gens-là qui ont émis l'idée à Cheikh Sidy Yakhya en sa deuxième année de khalifat. Ils sont les premiers à venir saluer Cheikh Sidy Yakhya pour demander sa bénédiction. Ce jour-là, j'étais en train de désherber les champs de Cheikh Sidy Yakhya quand j'ai aperçu les gens venir en voiture. Je me suis rendu chez moi pour me laver et aller chez le marabout. Et on m'a dit que ce sont les habitants de Badiga qui étaient venus requérir la bénédiction de Cheikh Sidy Yakhya. Ce jour-là, c'est moi même qui avait dirigé la prière du soir à la mosquée parce que Cheikh Sidy Mokhtar était trop pris par ses invités. Néanmoins, il nous a demandé de l'attendre après la prière. Quand il est venu, il a retenu la date, et celle-ci coïncidait avec la date du décès de Cheikh Bou. C'est ainsi qu'il a décidé devant l'assemblée que chaque année, à pareil moment, qu'on célèbre la nuit dédiée à la commémoration du décès de Cheikh Bou. C'est comme ça que la nuit de Cheikh Bou a été mise sur pied et cela s'est passé devant moi. Ce jour-là, fut le premier jour où j'ai dirigé la prière du soir.
52 :18 : HS : Vous m'avez expliqué que depuis le rappel à Dieu de votre père, vous êtes très proche des khalifes, est-ce-que vous avez constaté un changement sur la manière de diriger des khalifes ?
J'en sais quelque chose sur leurs manières de diriger et j'ai aussi été témoin de beaucoup de choses. Si je suis toujours travailleur et que je ne sais rien faire d'autre que travailler, c'est grâce à Cheikh Sidy Lamine. Cheikh Sidy Lamine était quelqu'un d'exceptionnel. Il était un homme de vérité, en son temps personne n'osait fauter, aucun talibé qui venait ici n'osait faire ce que bon lui semblait. Tous les talibés partaient travailler dans son champ. Nous les enfants des marabouts, nous travaillions pour nos pères et nos pères travaillaient pour lui en contrepartie. Le jour où on a fait le fondement de l'étage c'était parce que, pendant l'hivernage, il avait beaucoup plu et le perron s'était effondré. Il a ainsi appelé les gens de Thiès pour qu'ils viennent le réparer. C'est comme ça que la construction de l'étage a débuté, et on l'a continué. Il m'a raconté qu'un jour ils travaillaient tard dans la nuit et il les a servi à diner. Et il nous a dit si je vous demande de faire ce travail, ce n'est pas parce que je manque d'argent. Je voudrais que vous puissiez raconter, dans l'avenir, que c'est vous qui l'avait construit. Par contre, si je donne cela aux entrepreneurs, on dira tout simplement que c'est le travail des entrepreneurs. Et il dit, « je sais que je n'aurai pas besoin d'acheter du sable car Dieu m'en a fait don, de même que le béton car j'ai ma propre carrière. De même, j'ai de l'eau en grande quantité. » A l'époque, il y avait d'eau partout à Ndiassane. Il ajoute « l'argent du ciment, du fer et du bois je l'ai déjà mis à côté et j'en ai jamais touché pour faire quoique ce soit ». Il ne nous a enseigné le travail. Quand il est décédé, Baye Sidy Yakhya a fait appel à moi, et on a discuté. Baye Modou est venu, il est le père de El Hadji Mame Bou qui est le Khalife aujourd'hui et qui a fait deux ans et quatre mois. Quand il est venu, les gens étaient devenus un peu compliqués. Les gens ont dit que cela était difficile, et qu'ils étaient vieux et ne pouvaient plus faire certaines choses qu'ils avaient l'habitude de faire. C'est ainsi que Baye Modou a dit qu'il n'obligerait personne à travailler. Toutefois, puisque c'est moi qu'on avait appelé en premier, je me suis décidé à continuer le travail quel que soit la décision des autres. Il a donc demandé aux gens de travailler aux champs une fois par semaine, c'est-à-dire, les mercredis, puisque c'était difficile d'y aller tous les jours de la semaine. Ainsi tous les mercredis, on y allait tous ensemble pour travailler dans les champs. C'est comme ça que ça se fait jusqu'aujourd'hui.
57 :02 : HS : Est-ce-que vous êtes une fois parti avec un khalife au Mali ?
Oui !
57 :07 : HS : C'était qui ?
Je suis d'abord parti avec Cheikh Bou. A l'époque, j'étais parti avec Cheikh Sidy Yakhya pour une tournée. Quand on est arrivé à Kaolack, Baye Bou a dit à Cheikh Sidy Yakhya « je voudrais partir avec un disciple parce que je voudrais faire une tournée au Mali ». Cheikh Sidy Yakhya l'a répondu que le voyage est difficile, et lui a demandé de choisir n'importe quel disciple et qu'il le demanderait de l'accompagner. Il lui précise : « si je vous fais accompagner de quelqu'un avec qui vous ne vous comprenez pas bien, votre voyage ne se passerait pas comme il faut ». C'est ainsi qu'il m'a choisi parce que je comprenais le bambara et le wolof. Et Cheikh Sidy Yakhya lui donne son accord et lui dit « puisqu'on est presque à Kaolack, une fois à Kaolack, on ira en Casamance, mais après cela envoie moi quelqu'un chercher [Bécaye] et je vous le confierai ». C'est ce que lui a dit Sidy Yakhya mais il ne voulait pas le faire. Cheikh Bou se disait que j'étais très proche de Sidy Yakhya et qu'il ne voulait pas nous séparer. Il a attendu jusqu'à ce que l'on rentre à Ndiassane. Le lendemain, il est venu me chercher. Au moment où il allait saluer Sidy Yakhya, moi je me dirigeais à la mosquée pour la prière de l'après-midi et là on s'est croisé et il m'a dit qu'il était venu me chercher. Il m'a demandé si Sidy Yakhya m'avait dit quelque chose et je lui ai répondu que non. Et il m'a expliqué que c'est lorsqu'on était à Kaolack qu'il avait demandé à mon marabout si je pouvais l'accompagner au Mali et qu'il lui avait donné son accord mais qu'il ne voulait pas lui priver de ma compagnie pendant son périple. « Maintenant que vous êtes là, je suis venu vous chercher, je suis prêt et je voudrais partir demain », me dit-il. Et je lui ai dit que cela ne dépendait que d'eux, moi je ne fais qu'obéir à leurs ordres. Je suis allé prier entre-temps, il a vu Sidy Yakhya et il lui a dit qu'il voulait partir le lendemain. Quand je suis rentré de la mosquée, Sidy Yakhya m'a appelé et il m'a demandé si Serigne Bou m'avait dit quelque chose. Je lui ai répondu que non et là il m'a expliqué que c'est lorsqu'on était à Kaolack qu'il lui avait demandé s'il pouvait me laisser partir avec lui au Mali pour faire une tournée. Je lui ai dit qu'il n'y avait pas de problème et que tout dépendait d'eux. Il m'a dit je sais que tu es fatigué, je lui ai répondu que ce n'était pas un souci je ne suis que vos ordres et recommandations. Et il m'a bénit.
01 :00 :08 : HS : C'est sur ces mots que vous vous êtes quittés ?
C'est comme cela qu'on est parti. Quand je me suis réveillé, le lendemain je n'avais que 500 F CFA et Cheikh Bou m'avait demandé de le rencontrer à Rufisque. Avant de quitter la maison, ma femme me dit qu'on devait sevrer mon fils et que l'on devait acheter du lait. Je lui dis que je n'avais que 500 F et je devais aller à Rufisque, je n'osais même pas leur dire que j'allais au Mali parce que cela les étonnerait. Elle m'a demandé quoi faire alors et je lui ai dit que je partirai à Rufisque. C'est ainsi que les 500 F sont tombés dans la chambre et on ne pouvait plus les retrouver. C'est quand j'étais en route pour Rufisque que ma femme a retrouvé les 500F. Et elle s'est dite que je n'avais que 500 F et elle les a retrouvés, elle a donc décidé de venir me chercher à la gare pour me les remettre. C'était peine perdue, parce que j'étais déjà parti. Quand le receveur est venu me demander mon ticket de transport, je lui ai dit que je l'ai perdu, mais une fois à Thiès, j'ai un ami là-bas, il me prêtera de l'argent afin que je paie. A l'époque le ticket était à 200F ou 250F. Quand on est arrivé à Thiès, le chauffeur ne voulait pas s'arrêter. Arrivé à Rufisque, le receveur m'a demandé son argent et je lui ai répondu qu'il ne s'était pas arrêté à Thiès. Il dit qu'il ne voulait pas qu'une pareille situation se reproduise et je lui ai répondu que cela ne se reproduirai plus. C'est comme çà que je suis allé retrouver Cheikh Bou.
01 :02 : 23 : HS : Est-ce-que vous pouvez nous parler de ce voyage ?
Dieu a fait que ce jour-là on est arrivé la nuit, le matin il m'apostropha et me dit « nous sommes arrivés au Mali et je voudrais qu'on ait 3.000.000 dans ce voyage ». Je lui dis que ce n'était pas un problème et s'il plaisait à Dieu nous allions avoir la somme. Quand on est arrivé, un de nos disciples du nom de Sidy Ndour fut le premier à nous rendre visite. Il est venu avec un grand bélier et 25.000F CFA. Ensuite un autre est venu, c'est un non-voyant, il a dit à Cheikh Bou qu'il était son marabout car c'est lui Cheikh Bou qui, un jour à Tamba, avait fait formuler des prières pour lui. Le non-voyant lui dit « j'ai entendu que vous étiez là, c'est pour cela que je suis venu vous rendre visite ». Et là, il sort un billet de 5000 mille francs pour le donner au marabout tout en lui disant qu'il s'agissait d'un billet de 1000F CFA. Le marabout m'a demandé de lui dire qu'en effet il s'agissait d'un billet de 5000F au lieu de 1000F et le non-voyant m'a répondu que quand on donne à son marabout, on doit être humble, et que c'est pourquoi il dit 1000F CFA mais il sait bien qu'il s'agit de 5000F CFA. Et il ajoute que quand le marabout le convertissait à l'Islam à Tamba, à l'époque il n'avait même pas 1000F pour les lui donner. Maintenant qu'il est devenu non-voyant et pourtant Dieu lui a donné 5000F pour qu'il les lui remette. C'est comme cela qu'on a poursuivi et on a même eu une voiture durant ce voyage. De l'or et de l'argent, on en avait beaucoup. Il y a un village qu'on appelle Défarada, Ousmane Doumbouya le beau-fils de Sidy Yakhya est originaire de là-bas, le fils d'Ousmane est là… quand on a passé la journée là-bas le marabout a reçu 200.000F en un seul jour. Le lendemain, notre hôte nous a remis 200.000 mille francs de plus, ce qui fait qu'on s'était retrouvé avec 400.000 mille francs. Ce jour-là le marabout était tellement content qu'il m'a demandé, de chercher un endroit à la sortie du village où construire une mosquée. Quand on a choisi un lieu, on a dit qu'on allait commencer sans pour autant se précipiter. Mais quand on rentrait on avait dépassé les 3.000.000, on avait cinq malles de tissu thioubes, sans compter les autres petites choses qu'on a pu amasser. On est allé dans un village où au retour on nous a donné un pick-up Peugeot rempli de moutons, parce que chacun des notables de ce village nous avait donné un mouton. Malgré le bon voyage qu'on a fait, sur le chemin du retour quand on est arrivé à Koty, il me dit « Bécaye Fall, tu penses qu'on a fait un bon voyage ? » Je lui réponds « oui, mon marabout, on a fait un bon voyage ». Et il rétorque que non, que le voyage n'était pas bon du tout et cela m'avait étonné. Je lui dis que les 3.000.000 qu'on s'était fixé on les a eu, Il me dit que oui, on avait beaucoup d'argent, beaucoup d'or et des tissus mais qu'on avait amené aucun talibé avec nous à part ceux qui nous accompagnaient. Je lui ai dit que je ne l'avais pas compris ainsi, parce que moi je m'étais tout simplement focaliser sur les trois millions.
Celui à qui on avait confié la construction de la mosquée, réussit à la terminer en deux ans et vint remettre les clés à Cheikh Sidy Yakhya. Il lui expliqua que son frère était venu en tournée au Mali et lui avait confié la construction d'une mosquée et maintenant qu'il avait terminé la construction, il était venu remettre les clés. Cheikh Sidy Yakhya lui dit qu'il enverrait celui qui l'avait confié la construction de la mosquée pour qu'il vienne l'ouvrir. C'est comme ça qu'on s'est préparé pour y retourner. Quand on y est retourné, on nous a remis 40 têtes de bœufs, sans compter ce qu'on a tué. On a eu sept garçons et une fille comme des disciples aussi. Quand il était là, il me demandé de venir le voir très tôt, parce que disait-il « même quand je n'ai rien si vous venez vous me portez bonheur. »
01 :07 :43 : HS : Je voudrais savoir comment est-ce-que vous communiquez avec vos parents et disciples au Mali. Est-ce-que vous utilisez les téléphones portables ? Est-ce-que les téléphones vous sont très utiles, et comment est-ce-que vous communiquiez autrefois ?
Ils sont très utiles, autrefois à l'approche du gamou, on leur envoyait des lettres et jusqu'à présent cela se fait, mais c'est moi qui partais, avant, pour leur rappeler la date et les inciter à venir. Maintenant on s'appelle et on les avise à l'approche de la date.
01 :08 :25 : HS : Est-ce-que vous pouvez nous parler de la vie des enfants autrefois ici à Ndiassane, y a-t-il un changement ?
A dire vrai, je rends grâce à Dieu, parce que les enfants m'aident beaucoup. Maintenant, je ne donne plus la dépense quotidienne. Je les ai toujours dit seul le travail paye. Le jour où Baye Sidy Yakhya m'a appelé, c'est ce jour-là que j'ai cessé de travailler pour mon propre compte. Avant il y avait toujours du riz chez moi tellement que j'en cultivais en abondance. J'avais tellement de stocks de riz que mes enfants avaient le choix. Il préférait le riz de l'année en cours plutôt que celui de l'année précédente. A l'époque j'étais toujours à jour. Les gens me réveillaient même la nuit pour que je leur prête de l'argent. Maintenant je n'ai plus ses moyens là, mais je rends grâce à Dieu.
01 :09 :50 : HS : On a presque terminé, il ne reste que deux questions, la première est, quels sont vos besoins présentement, que pensez-vous de votre vécu avec le marabout, et qu'est-ce qui vous a le plus marqué dans votre vie?
Présentement, je peux vous dire que j'aime beaucoup cultiver. J'aime beaucoup cultiver et là où je vous parle, on est en train de semer du mil dans mon champ. Deuxièmement, j'aurais souhaité que mon puits qui m'était très utile soit recreusé pour que je puisse avoir de l'eau en abondance et cultiver en toute quiétude. Ou alors, si je peux trouver un puisatier qui peut m'indiquer un endroit où trouver de l'eau facilement parce que, moi, je ne sais que cultiver et faire vendre mais produits agricoles. Je n'ai jamais été salarié. En plus, je ne suis qu'un disciple qui s'occupe des invités du marabout. Il y en a qui pense que c'est le marabout qui me donne tout. C'est pourquoi certains ne me donnent rien du tout, ils donnent tout au marabout.
Un jour, j'ai rencontré un de mes anciens élèves qui m'a indiqué là où creuser afin d'avoir de l'eau. Je lui ai demandé combien lui payer pour qu'il me construise un puits et il m'a répondu 50.000F CFA. Il m'a demandé d'acheter aussi du ciment et du fer. Je lui ai dit que j'étais d'accord. Il m'a dit qu'il était en train de creuser un autre puits et dès qu'il aura terminé, il viendrait, je lui ai dit d'accord. L'hivernage c'était installé avant qu'il ne termine l'autre puits et je suis parti au Mali après. Quand je suis revenu, il n'est pas venu me voir parce que le temps ne le lui permettait pas. Quand je suis allé voir le puits que j'avais déjà dans mon champ, j'ai trouvé qu'il y avait des traces d'eau et là je me suis dit donc que l'eau n'était plus très en profondeur. J'avais un invité à la maison du nom de Diarra, quand il est entré et qu'il s'est mis à creuser à peine peu de temps, l'eau s'est mise à jaillir. Quand je l'ai dit au marabout, il m'a dit que cela s'était produit à une époque mais quand les gens se sont mis en a parler, l'eau avait aussitôt disparu. C'est comme ça que je me suis tu. Maintenant, mon plus grand souhait c'est de trouver un moteur qui me permettra de pomper l'eau. En tout cas, moi, je préfère les champs. C'est ce dont j'ai besoin. Tout récemment, j'ai vendu deux sacs d'aubergines des champs.
01 :13 :10 : HS : Rendons grâce à Dieu.
01 :13 :13 : Pendant l'hivernage, si on cultive la terre cela nous permettra de subvenir à nos besoins et si pendant l'hivernage il ne pleut pas, vous arrosez vos champs. Que Dieu nous accorde la paix, je suis aussi très ravi de votre visite. J'en suis très content, j'en suis très content.
01 :13 :31 : H.S : Pour terminer, quelles sont vos ambitions pour Ndiassane ?
Ndiassane est dirigé par Cheikh Bou, c'est Cheikh Bou lui-même qui gère Ndiassane. Baye Sidi Yakhya a toujours dit que Ndiassane est bénite par Cheikh Bou et on vit de cette bénédiction. On n'a pas d'usine ici, ni un endroit où les jeunes peuvent aller trouver du travail. On ne fait que se débrouiller. Si vous construisez, ils peuvent venir vous prêtez main forte. A part la maçonnerie, il n y a pas d'autres métiers excepté les études. Et cela a débuté avec la nouvelle génération, et ils sont très jeunes pour le moment. Pour le moment, on laisse tout entre les mains de Dieu et de Cheikh Bou.
01 :14 :42 : HS : Que suggériez-vous à quelqu'un qui souhaiterait vous aider, parce que vous m'avez parlé des champs, mais à part cela y a-t-il un autre secteur où on peut vous aider?
Quelqu'un qui n'a rien si vous l'aidez en habitation, son problème sera presque résolu. Les aliments se mangent et c'est terminé, alors que les maisons demeurent. On y reste même si on a faim et qu'on n'a rien à manger. Si vous partez, vos enfants pourront en bénéficier alors que si vous me donnez une tonne de riz, on le mange et c'est terminé.
01 :15 :42 : HS: Donc vous préférez qu'on vous aide pour que vous ayez le matériel nécessaire pour les travaux champêtres afin que vous puissiez cultiver, vendre et subvenir à vos besoins. Ensuite, vous voulez des habitations, d'accord. Maintenant, quel est votre mot de la fin?
Je ne fais que prier pour vous pour que ce que vous envisagez de faire pour la cité, que Dieu vous aide à l'accomplir. Parce que ce qui est l'origine de ces bonnes idées permettra de les accomplir. Je vous souhaite aussi une longue vie, beaucoup de santé, protection divine et une plus forte foi en Dieu. Je prie pour que toutes ces choses que nous avons, et que nous n'avons jamais eu ou alors cela date de longtemps, je prie pour qu'elles augmentent.
01 :16 :32 HS : Amen ! Amen !
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Courtesy of Maria Grosz-Ngaté
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Language: Wolof
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Digitizer: Maria Grosz-Ngaté