Traduit par M. Adrien Pouille
Sidi Ahmed « Bou Naama » Kounta, le père de Bou Kounta appartient à la branche Hemmal de la confédération des Kountas qui regroupe un vaste réseau généalogique d’érudits, de commerçants et de pasteurs répandu à travers la partie occidentale du Sahara. Les ecclésiastiques et de commerçants de la famille Kounta ont joué un très important rôle dans l’expansion de la Khadriya dans les régions situées au Sud du Sahara au cours de leurs voyages suivant ainsi un modèle d’expansion pacifique par voie commerciale. Cheikh Ahmed al-Bekkaï Kounta et son descendant Cheikh Sidi Mokhtar al-Kunti acquièrent une renommée pour leur piété et leur intelligence remarquables à travers tout le Sud du Sahara respectivement au 15e et 18e siécles. Sidi Mokhtar (né vers 1729) a attiré un plus grand nombre de disciples grâce à son éducation exceptionnelle, sa réussite quant à sa médiation de disputes, sa piété exemplaire vu comme une directe émanation de la formation spirituelle qu’il a reçue. Bien qu’il ait vécu modestement, il développa les activités commerciales des Kountas. Il fit de sa communauté religieuse une institution publique hiérarchique organisée autour de liens de parenté, de rapports religieux avec les disciples qui n’appartenaient pas à la famille et d’un réseau de centres religieux soufis (sing.
zaouïa). L’institution était sous la seule direction de Sidi Mokhtar. C’est lui qui lui conféra son unique caractère et c’est ainsi que l’institution finit par être appelée la confrérie Khadriya-Mokhtariya (Brenner, 1988). Il a laissé un large volume d’écrits érudits et de prières à sa mort.
Bou Naama Kounta grandit dans le désert au Nord de Tombouctou et reçut son éducation religieuse au
zaouïa de Cheikh Sidi Mokhtar. C’est à la fin du 18e siècle qu’il a été envoyé à la Sénégambie pour faire des affaires et propager la foi. (En ce qui concerne la tradition orale portant sur ce voyage, voir
Bou Khalifa Kounta_entrevue 1) Après avoir fait preuve de ses pouvoirs spirituels dans le cadre de ses relations avec la famille royale du royaume wolof de Cayor, il demanda au roi de lui donner un terrain où s’établir et enseigner. Sa requête fut acceptée ce qui lui permit de fonder le village de Ndankh Narr en 1800. (Ndankh est à quelques kilomètres de Mékhé qui se trouve sur la route nationale 2 menant à Saint Louis.) Bou Naama retourna dans le désert en 1811 pour présenter ses condoléances à l’occasion de la mort de Cheikh Sidi Mokhtar. Par ailleurs, il demanda à son guide religieux de lui donner la permission de demeurer au Cayor en permanence afin de répandre la foi et cela lui fit accordée. Il se maria avec des femmes du terroir, fonda une famille, et resta à Ndankh jusqu’à sa mort en 1840.